Introduction

Arabe littéraire et dialectes

L’Arabe est une langue unique dans sa forme littéraire, celle que l’on apprend à l’école, celle que l’on lit – livres, journaux – et qu’on entend à la radio. Mais dans la conversation, tout le monde parle, habituellement, l’arabe dialectal, chaque pays ayant son dialecte, du Maroc à l’Irak.

Les deux langues, littéraire et parlée (dialecte), sont bien sœurs, mais les différences sont assez grandes. Beaucoup de mots sont communs aux deux, mais beaucoup aussi sont différents ; en outre, parfois le même mot a un sens en littéraire et un autre en dialecte.

Ce cours traite du dialecte libanais, en fait proche de celui de Syrie et de Jordanie. Si on le sait, on pourra donc comprendre quelqu’un de Damas ou de Amman et se faire comprendre de lui, malgré les différences. Même à l’intérieur de ce dialecte, notons qu’il y a quelques différences suivant les régions et même d’un village à l’autre. Il ne faudra pas s’en étonner. On choisira telle forme (celle du lieu où l’on réside) pour la dire soi-même, mais il est bien de savoir les autres formes pour les comprendre en les entendant.

Pourquoi transcrire en caractères latins ?

L’alphabet arabe, qui est évidemment adapté à la langue littéraire, ne peut cependant rendre tous les sons du dialecte, spécialement certaines voyelles brèves (e, é, o, u, ö…) et ce qui fait que tel dialecte est libanais ou égyptien… De plus, la transcription en lettres latines rend plus facile l’étude de l’accent tonique (qui se déplace dans le mot) et permet d’exprimer le petit e qu’on glisse par ci par là dans la phrase pour la rendre plus coulante.

L’usage de la transcription est une habitude à prendre. Si on s’y met dès le début, sans réticence, on s’y fait vite et cela permet dans la suite de prendre des notes en dialecte avec précision et de les relire exactement dix ans après.

C’est assurément très bien d’apprendre à lire l’arabe littéraire, il y a des livres très bien faits pour cela. Mais notre cours vise la langue parlée et ne peut tout faire… On a préféré renoncer à faire les deux à la fois, à cause d’inconvénients réels.

Ce n’est sûrement pas par hasard que, si d’anciennes méthodes d’arabe parlé ont employé les caractères arabes, maintenant par contre, les méthodes les plus récentes, du Maroc à l’Irak, sont en transcription. Certains linguistes arabes de renom ne font pas exception.

Méthode d’étude

Il est conseillé d’étudier chaque jour un peu (et non trois heures de suite une fois par semaine). Si une leçon est trop longue, la couper en deux, en trois, la reprendre le lendemain. Ne pas s’étonner de ne pas tout retenir de chaque leçon. Il faut aller de l’avant sans être sûr de chaque mot déjà rencontré. Mais revenir de temps en temps en arrière, feuilleter les leçons déjà vues, s’arrêter à ce qui semble oublié, lire les textes en français et essayer de retrouver le texte arabe sans le regarder. Ne pas s’affoler, tout s’apprend par la répétition, à la longue, et les règles énoncées théoriquement vous entreront dans la langue et le palais grâce aux nombreux exercices.

Il faut les deux :

− sans la règle expliquée, on reste dans le vague, on croit que tout cela se fait au hasard, les exercices restent œuvre de perroquet ;

− sans les exercices pratiques, la règle ne rentre pas, n’est pas assimilée et reste théorie abstraite.

Ce qu’il faut donc, c’est une répétition d’exercices en comprenant ce qu’on fait, en faisant attention, non au hasard.

Prononciation

L’arabe est une langue difficile à prononcer, mais on peut y arriver si on maintient l’effort. Aucune explication par écrit ni enregistrement normal (audition un peu floue) ne peuvent remplacer des exercices avec une personne de la langue : l’observer, l’écouter, essayer de répéter. C’est quelquefois une bonne aide d’écouter les conseils de quelqu’un qui a eu à découvrir lui-même comment prononcer telle ou telle lettre. Mais il est bon en outre d’écouter attentivement des gens dont l’arabe est la langue.

En tous cas, il faut se rappeler deux choses, et s’armer de patience :

− Une lettre qu’on n’arrive pas à prononcer du premier coup ou même après un mois, peut être acquise (conquise, pourrait-on dire) à la longue. Il faut avoir eu l’occasion de bien entendre la lettre et dans des positions très différentes, dans des mots où elle ressort bien… et il faut que le palais et la langue s’habituent à la prononcer, prennent le pli physique ; c’est une vraie gymnastique corporelle, un assouplissement qui donne ses fruits avec le temps.

− Quand on n’arrive pas à prononcer un mot ou une phrase d’un trait, sans achopper ou abîmer au passage tel ou tel son, il faut prononcer ce mot ou cette phrase lentement, en articulant, en s’appliquant à ne rien bâcler, puis répéter et répéter encore, mais sans accélérer trop vite, puis laisser tomber. Quand on y revient plus tard, cela sort déjà plus facilement, et si l’on s’applique à lire ainsi les textes tranquillement, leçon après leçon, à voix haute bien entendu, au bout de quelques semaines cela sortira tout naturellement et à vitesse voulue.

N.B. : Lutter contre la tendance naturelle à parler aussi vite que l’interlocuteur arabe ! La vitesse est contagieuse, mail il faut modestement revenir à notre rythme.

Enfin, bien reproduire l’accent tonique (le chant de la langue), les syllabes sur lesquelles le ton monte, et ne pas oublier de bien allonger les longues accentuées. Si on dit hâl comme le français "balle", on dira "vinaigre" (hall) au lieu de dire "oncle maternelle" ; il faut dire hââl.

Quand on aura fini le cours, il faudra le reprendre à la leçon 1, et, sans regarder le texte arabe, en ne lisant que le texte français, essayer de retrouver, comme il est dit ci-dessus, les phrases arabes (et faire cela à haute voix, bien sûr)

On s’apercevra alors que des choses que l’on croyait savoir et que l’on comprend même très bien, on ne sait pas les dire soi-même : on n’avait pas fait attention à la préposition employée ou à tel détail ! Quand on entend, on comprend, mais c’est "l’autre" qui s’est préoccupé de choisir la préposition voulue ! Mais quand on doit le dire soi-même…

Ce cours est différent d’un cours donné en classe où le professeur est là pour expliquer, mimer, corriger la prononciation de l’élève (s’il y pense !) Il est fait surtout pour celui qui étudie par lui-même ; la méthode est nécessairement différente, les explications plus longues.

Le présent cours est une adaptation de "L’arabe sans larme", initialement conçu pour l’apprentissage du dialecte palestinien, et spécialement revu en fonction du dialecte libanais. Une langue est quelque chose de vivant : On tiendra compte beaucoup plus de ce qui se dit, que de ce qui est écrit dans le cours. Une remarque importante toutefois : on est toujours profondément marqué par sa langue d’origine : un syrien donnera la prononciation et le vocabulaire de Syrie. Il faudra savoir distinguer ce qui est proprement libanais de ce qui est syrien ou palestinien.

Ce cours pourra être repris, corrigé, complété en profitant des suggestions des usagers. En attendant, nous espérons qu’il pourra déjà rendre service dans son état actuel.